1. Présentation de la Liste Négative des investissements étrangers en Chine
Contrairement à l’ancien système basé sur un Catalogue des investissements autorisés, la Liste Négative repose sur une logique inverse : elle énumère uniquement les secteurs dans lesquels les investissements étrangers sont restreints ou interdits.
- Les secteurs restreints imposent des conditions particulières : création obligatoire d’une coentreprise, limitation de la participation étrangère ou autres exigences réglementaires.
- Les secteurs interdits quant à eux, sont totalement fermés aux capitaux étrangers, sans possibilité d’y investir, quelle que soit la structure envisagée.
1.1 La Liste Négative applicable aux Zones Franches (FTZ)
Lancée en 2013, cette liste concernait initialement uniquement les zones franches chinoises. Depuis lors, le nombre d'activités restreintes a été considérablement réduit, passant de 190 à 27. Actuellement, tous les secteurs de production sont ouverts aux investissements étrangers dans ces zones. Un autre exemple : le secteur des enquêtes sociales est ouvert, mais limité à 33 % de participation étrangère dans le cadre d'une joint-venture. La version officielle (2021) toujours en vigueur est téléchargeable ici (en chinois).
1.2 La Liste Négative Nationale
En 2016, le modèle testé dans les zones franches est étendu à l'ensemble du pays avec la publication de la 1ère Liste Négative nationale. Elle s'applique a toutes les entreprises étrangères souhaitant s'implanter en Chine (hors zones franches).
La version actuelle de 2024 de la liste négative réduit le nombre de secteurs soumis à des limitations de 31 à 29. Entrée en vigueur au 1er novembre 2024, elle supprime les 2 dernières restrictions restantes dans le secteur manufacturier. Celles-ci étaient l'impression de publications et la préparation de médecine traditionnelle chinoise, activités désormais ouvertes aux investisseurs étrangers.
1.3 Les 29 secteurs d'investissements étrangers restreints ou interdits en Chine
Ci-dessous, voici un tableau récapitulatif des 29 secteurs d'activité soumis à restrictions à l'investissement étranger en Chine. Cette liste est extraite et traduite de la Liste Négative officielle de 2024 actuellement en vigueur :
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Secteurs d'activité |
Les restrictions, limitations ou interdictions |
1 |
Sélection et production de semences |
La participation chinoise doit atteindre au moins 34 %. Cette exigence reflète la volonté des autorités de protéger la sécurité alimentaire et de conserver un contrôle national sur les ressources génétiques végétales. |
2 |
Variétés agricoles rares |
Investissement étranger interdit |
3 |
OGM (animaux et plantes) |
4 |
Pêche en eaux territoriales |
5 |
Minéraux stratégiques |
Exploration et exploitation interdites sur les terres rares, le tungstène, etc. |
6 |
Énergie nucléaire |
Obligation d'exploiter et de construire via une JV sino-étrangère |
7 |
Impression de publications |
Contrôle obligatoire de l'activité par la partie chinoise. L’impression de livres, journaux, magazines et autres publications est soumise à un contrôle strict par un partenaire chinois de coentreprise. Les investisseurs étrangers ne peuvent ni détenir de majorité, ni exercer d’autorité sur le contenu ou la gestion éditoriale. Cette activité reste hautement sensible du point de vue culturel et politique. |
8 |
Pharmacopée traditionnelle |
Les procédés de cuisson, calcination, etc sont interdits |
9 |
Commerce du tabac |
Monopole d’État |
10 |
Transport maritime domestique |
Le cabotage et le transport intérieur en Chine sont ouverts aux investisseurs étrangers seulement via des JV majoritairement chinoises et sans accès au contrôle opérationnel. Les services concernés incluent le transport de fret, de passagers, la logistique portuaire locale et le cabotage. |
11 |
Compagnies aériennes |
Participation étrangère ≤ 25 % et direction chinoise. En revanche, la Chine autorise désormais l'activité de production et d'assemblage pour le secteur aéronautique et l'aviation civile en WOFE. Cela signifie pas d'obligation de coentreprise, dans certaines zones pilotes autorisées. Les compagnies aériennes civiles restent soumises aux règles de la Liste Négative : participation étrangère limitée à 25 % et direction légale chinoise imposée .
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12 |
Aéroports civils |
Investissement étranger interdit |
13 |
Services postaux |
Investissement étranger interdit |
14 |
Télécoms de base |
Opérateur chinois obligatoire |
15 |
Télécoms à valeur ajoutée |
Participation étrangère ≤ 50 %. Les services de télécommunications à valeur ajoutée (hébergement web, plateformes en ligne, e-commerce, etc.) sont ouverts aux capitaux étrangers, mais dans la limite de 50 % de participation dans une JV. Besoin additionnel d'obtenir une licence spécifique (VATS), selon l'activité cible. Ces restrictions visent à garantir un contrôle national sur les données et les infrastructures numériques.
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16 |
Services médias en ligne |
Hors exceptions selon les accords de l'OMC, ils sont interdits |
17 |
Cabinets d’avocats |
Implantation étrangère directe interdite sous forme de société |
18 |
Études de marché |
Co-entreprise requise |
19 |
Enquêtes sociales |
Uniquement permis via une coentreprise qualifiée |
20 |
Recherche génétique |
Thérapie génique, cellules souches interdites |
21 |
Sciences humaines |
Investissement étranger interdit. Les activités liées à la recherche, l’enseignement ou l’édition dans les domaines de la philosophie, histoire et sociologie sont fermées aux capitaux étrangers. Cette interdiction vise à préserver le contrôle idéologique et culturel de l’État sur des disciplines considérées comme sensibles pour la cohésion sociale et politique. |
22 |
Cartographie sensible |
Géologie, sismologie, etc sont interdits aux investissements étrangers |
23 |
Établissements scolaires |
JV obligatoire + obligation d'une direction chinoise |
24 |
Éducation religieuse |
Interdiction complète |
25 |
Institutions médicales |
Uniquement en JV mais exceptions pour certains hôpitaux 100 % étrangers. Depuis septembre 2024, la Chine autorise à titre expérimental l’ouverture d’hôpitaux 100 % étrangers dans 9 zones pilotes (dont Pékin, Shanghai, Guangdong, Hainan). Ils doivent ne pas exercer dans la médecine traditionnelle chinoise et employer au moins 50 % de personnel médical chinois. |
26 |
Agences de presse |
Interdiction totale |
27 |
Production télévisuelle et radio |
Investissement étranger interdit |
28 |
Production cinéma |
Interdiction complète |
29 |
Musées et enchères culturelles |
Activité monopolistique, réservée à l’État. |
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En résumé, les 29 restrictions a l'investissement étranger couvrent principalement des secteurs économiques, culturels et politiques sensibles afférents a la sécurité nationale, le contenu éditorial, la santé et le contrôle de l’information en Chine.
Pour cette version de la Liste Négative, les 29 secteurs restent principalement soumis à des limitations. Elles se traduisent le plus souvent par le besoin d'exploiter l'activité cible avec des coentreprises en JV assorti ou non d'une clause de contrôle obligatoire par une direction chinoise.
Enfin, certaines zones (Free Trade Zones, provinces) peuvent bénéficier d’exceptions locales, mais l’approche nationale est demeurée prudente dans ces domaines.
2. Plus globalement, le cadre réglementaire chinois des investissements
La liste aide les investisseurs à identifier les limitations dans le paysage commercial chinois. Elle présente aussi des opportunités pour les entreprises françaises en Chine. Offrant une certaine transparence et prévisibilité aux investisseurs, elle permet de planifier des investissements en connaissance de cause.
Depuis 2022, les sévères restrictions imposées par la Chine pour contrôler l'épidémie de covid-19, et l'environnement international incertain ont significativement entravé sa croissance économique. En conséquence, la stabilisation des investissements d'origine étrangère et l'optimisation de leur répartition sont devenues une préoccupation majeure du gouvernement.
La réduction des restrictions de la Liste Négative et la publication d'une Liste Encouragée sont les marqueurs actualisés de l’ouverture du marché chinois aux investissements extérieurs.
2.1. Les secteurs d'investissements encouragés par les autorités chinoises
Parallèlement, depuis 2022, la NDRC (Commission nationale de développement et de réforme) publie une Liste des secteurs encouragés pour guider les investissements étrangers. La version la plus récente de cette liste est le Projet pour consultation publique, diffusé pour avis public en Chine le 20 décembre 2024.
La catégorie encouragée met l'accent sur les technologies avancées et les industries cruciales pour le développement économique et social, comme les énergies propres, la haute technologie et la biotechnologie. Ces secteurs visent à moderniser les infrastructures et réduire l'impact environnemental tout en s'alignant sur des objectifs à long terme.
La catégorie restreinte inclut des industries utilisant des technologies dépassées ou avec un faible potentiel de croissance, soumises à des contrôles plus stricts car elles ne répondent plus aux priorités nationales d'innovation et de durabilité.
Enfin, la catégorie obsolète concerne les technologies et produits violant les normes environnementales ou générant une forte pollution, comme l'exploitation du charbon. Ces activités sont progressivement éliminées alors que la Chine adopte des pratiques plus écologiques. |

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2.2 Exemples de secteurs encouragés et politiques préférentielles
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Industrie automobile : véhicules électriques, hybrides rechargeables, véhicules à hydrogène.
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Industrie pharmaceutique : les dispositifs médicaux innovants, la recherche sur les maladies rares.
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Énergie verte : production d'hydrogène, technologies de réduction des émissions de carbone. Cette direction fait écho à la réglementation européenne du Mécanisme d'Ajustement Carbone aux Frontières (MACF).
Des politiques préférentielles pour les investisseurs consistent en des exonérations fiscales ou réduction de l'impôt pour certaines activités dans des zones spéciales comme Hainan et les régions de l'ouest.
3. Une nouvelle dynamique d’accueil des capitaux étrangers en Chine
Depuis le 1er juillet 2024, la nouvelle version de la Loi chinoise sur les sociétés est entrée en vigueur, marquant un tournant significatif dans la volonté affichée par les autorités d’attirer davantage d’investissements internationaux. En assouplissant certaines contraintes réglementaires, et tout en conservant des limites dans les secteurs jugés sensibles, la Chine souhaite encourager les projets à forte valeur ajoutée. La tendance assumee est de favoriser les domaines technologiques, les activités de production ou d'assemblage moderrnes et les projets environnementaux.
Cette évolution s’inscrit dans une logique plus large d’ouverture ciblée. Elle combine la réduction des restrictions de la Liste Négative, la publication de listes incitatives et la mise en œuvre de politiques préférentielles locales. Toutefois, derrière ce cadre général, l’analyse au cas par cas reste essentielle : chaque projet d’implantation est examiné par les autorités locales selon des critères techniques, industriels et territoriaux spécifiques.
C’est dans cette perspective qu’il convient de comprendre les démarches pratiques d’implantation et de structuration juridique : objet social, capital investi, licences spécifiques et régimes fiscaux ou douaniers doivent être soigneusement négociés pour sécuriser durablement une présence en Chine.
Pour mémoire, les formes juridiques des investissements internationaux en Chine sont :
Enfin, un projet d'accord d'investissement Chine - Europe a été signé fin 2020. Il avait pour ambition de contribuer à renforcer la confiance et une meilleure transparence dans la collaboration des entreprises. Néanmoins, en raison de tensions diplomatiques en mai 2021 entre l'UE et la Chine, cet accord n'est pas entré en vigueur. Les négociations de sa mise en œuvre reprennent cependant depuis juin 2025.